La complexité de la langue française réside, entre autres, dans ces mots presque identiques grammaticalement et phonétiquement, mais qui mènent dans des directions totalement différentes en terme de sens. Tout comme « prodige » et « prodigue », deux termes fréquemment suivis par le terme « enfant », leur similarité sème le doute en lieu de clarifier le propos.
Les pierres angulaires de notre patrimoine linguistique méritent d'être polies et chouchoutées. L'envie de chérir le français m'a frappé alors que j'étais devant une habitation à Angers, sur le fronton de laquelle figurait « l'enfant prodigue ». C'est pourquoi aujourd'hui, humblement, je vais tenter d'ériger ici, un échafaudage solide pour soutenir cette grandiose construction qu'est notre langue française.
Le terme « prodige » fait référence à quelque chose de fantastique, d'étonnant, voire de miraculeux. L'individu désigné comme tel est généralement doué de façon exceptionnelle dans un domaine qui requiert habituellement une maturité certaine, et par conséquent, un certain âge. Mozart, Picasso… Ces virtuoses ont contribué à l'épanouissement de leur art bien avant d'être officiellement adultes. On les appelle des « enfants prodige ».
Quant à « l'enfant prodigue », il s'agit d'une référence à une parabole du Nouveau Testament (Luc, XV, 11-32). Un jeune homme exige de recevoir son héritage en anticipation, le gaspille grossièrement pour ensuite subir une vie de misère. Il retourne misérablement dans son foyer paternel, où malgré ses erreurs, il est gracieusement accepté.
L'adjectif « prodigue » est maintenant utilisé pour décrire quelqu'un dont le seul « talent » est une dépense débridée, exagérée. Il reflète aussi, dans un sens figuratif, quelqu'un qui donne généreusement.
Bien sûr, l'un n'éclipse pas forcément l'autre. Cependant, le talent d'un prodige suffit généralement pour garantir son avenir afin qu'il ne se transforme pas en prodigue… Ces deux mots, bien que similaires en apparence, ne doivent pas être confondus. Dans le français, ces faux amis, ces termes presque jumeaux mais au sens différent, sont appelés « paronymes ».